Écoutes de Spectacles

Isabelle Druet R

 • Paris • 26/02/2010

Isabelle Druet, mezzo-soprano
Stéphane Jamin, piano

photo © Thomas Bartel

Un talent de comédienne est un grand atout pour une chanteuse. Chez Isabelle Druet, il se double d'une personnalité qui lui permet d'effectuer des choix très justes et de les imposer avec une sincérité désarmante. Alors que les prix pleuvent sur elle depuis sa sortie du conservatoire, sa carrière se développe de manière variée et intéressante. Après avoir chanté dans Amadis au début du mois, elle chantera le mois prochain dans Sancho Pança ici-même.

Ce soir, Isabelle Druet et Stéphane Jamin ont judicieusement mêlé les pièces les plus et les moins connues. Dès la deuxième, Isabelle Druet a installé une résonance plus haute et fine, gage d'une ligne vocale ductile et de belles tenues finales piano. Elle sait varier son émission mais aussi tous les paramètres de son interprétation, jusqu'à sa posture. Savoir attendre d'Amédée de Beauplan lui permet de jouer successivement et alternativement la jeune fille, la femme, la grand-mère, ce qui lui va bien sûr à merveille, comme le personnage du Boléro de Gounod, dont elle poitrine allègrement le style "espagnol". La déclamation dramatique des Adieux de Jane Gray d'Henri Montan Berton et la veine plus "réaliste" des Cinq étages de Béranger révèlent encore d'autres facettes de son talent dramatique. Elle sait ausssi laisser un moment de répit au public avec une pièce tendre comme Absence de Gounod, ou les mélodramatiques J'ai peur de Gounod et L'orpheline du Tyrol de Rossini (et son inévitable yodl !), interprétés avec une sobriété de bon aloi. Le comique est par contre sans doute involontaire quand Isabelle Druet équipe les gardes de Venise de longues zallebardes.

Pour offrir quelques minutes de repos à la mezzo, Stéphane Jamin joue l'allegro op.70 de Saint-Saëns. D'une brillante écriture lisztienne, cette pièce serait mieux mise en valeur par un meilleur piano dans un plus grand espace. Un jeu plus aéré de la part de Stéphane Jamin pourrait-il compenser cela? Dans L'attente qui suit, du même Saint-Saëns, Stéphane Jamin est à l'inverse étrangement léger - peut-être pour tenir le tempo, qui semble pourtant excellemment choisi? Toujours est-il qu'il ne fait pas du tout sonner la main gauche, qui offre pourtant de beaux effets dramatiques. Autre tempo plus problématique, celui de Ô ma belle rebelle, franchement précipité, qui en gomme toutes les syncopes. En bis, Les berceaux de Fauré sont pris dans un tempo très lent mais qui fonctionne. Si l'on sait tenir sa ligne vocale comme Isabelle Druet, ce tempo rend même cette pièce plus captivante que d'ordinaire. Un programme très bien composé et interprété !

À écouter à l'Opéra Comique les 2 et 4 mars à 13h et sur France-Musique le 18 mars à 10h30.