Écoutes de Spectacles

Harawi

 • Paris • 23/04/2013
Karen Vourc'h, soprano
Vanessa Wagner, piano


Maquette

Harawi démontre que l'on peut écrire une oeuvre superbe sur des paroles ineptes. N'était-ce d'ailleurs pas ainsi que nous percevions le chant en langue étrangère avant le surtitrage? Non mobilisés par la compréhension, non perturbés par le sens, nous étions libres de nous laisser flotter dans les cieux musicaux...
Ici, nous reconnaissons des mots, bien prononcés par Karen Vourc'h, mais le texte relève d'une écriture automatique d'inspiration aussi "péruvienne" que Bécassine est bretonne. Dans cet univers naïvement "poétique", Olivier Messiaen nous charme donc surtout par sa musique. Sa beauté est toujours évidente, même si une certaine lassitude peut apparaître après les deux tiers de l'oeuvre, quand on réalise qu'aucune proposition nouvelle ne nous est faite.

Le toucher et la sensibilité de Vanessa Wagner, parfois discutables pour des répertoires plus classiques, sont ici idéaux. La voix de Karen Vourc'h aussi, moins impérieuse que d'autres interprètes du cycle, avec sa voix tranchante mais enveloppée, comme une lame dans de la soie... Si son interprétation est plus caressante et humaine, c'est aussi grâce aux mouvements chorégraphiés par Lodie Kardouss, agréablement proches du premier degré par rapport au texte. La vocalité et le phrasé y gagnent aussi en souplesse.
L'apport des lumières qui hérissent le plateau est moins évident. On aurait pu rêver des ambiances colorées "sud-américaines", ou bien des palpitations, des scintillements moirés au gré des émotions qu'une âme naïvement offerte pourrait éprouver en se glissant dans la peau de Piroutcha, mais les "réverbères" ne font que changer parfois de couleur entre deux pièces, sans même changer la couleur des robes blanches qui jumellent les interprètes, puisque celles-ci sont éclairées par ailleurs, comme la scène qui n'est jamais plongée dans la pénombre. Des idées à creuser peut-être, mais pas encore abouties. Reste un très beau récital !