Écoutes de Spectacles

Le Désert C

 • Paris • 06/05/2014
Orchestre de Chambre de Paris
Laurence Equilbey (dm)
Cyrille Dubois, ténor
Zachary Wilder, ténor
Jean-Marie Winling, récitant

Un cycle de la Cité de la Musique consacré aux déserts nous donne l'occasion d'entendre le rare Désert de Félicien David. Partition louée par Berlioz, qui s'en souvient peut-être quand il compose le duo nocturne des Troyens, cette pièce est effectivement pittoresque mais reste sagement occidentale. Elle a connu un grand succès lors de sa création et a été souvent reprise ensuite.

Comme pour le plus tardif concerto de Saint-Saëns donné en première partie (auquel on aurait pu préférer ses Mélodies persanes?), on regrette surtout les instruments modernes du toujours prosaïque Orchestre de Chambre de Paris, quand des couleurs plus chaudes de bois et de boyaux auraient pu insuffler à cette musique l'âme qui lui fait défaut ce soir. Laurence Equilbey n'a-t-elle pas créé justement Insula Orchestra, qui jouant sur instruments d'époque aurait pu rendre justice à Félicien David? Les deux oeuvres ont en tout cas en commun d'avoir été inspirées par des voyages en Égypte, et Félicien David n'est pas le moins inspiré des deux compositeurs.

Côté vocal, la voix claire de Cyrille Dubois se prête bien aux solos du ténor. Pour chanter le muezzin, on lui a adjoint la voix encore plus aiguë de Zachary Wilder, qui réussit une belle liaison de la voix pleine à un fausset légèrement renforcé, qui reste droit et pur. Encore un exemple des multiples ponts que l'on peut jeter entre les registres, nonobstant le dogme scientifique de leur séparation radicale.
Tout aussi important, le rôle du récitant est tenu avec une louable sobriété par Jean-Marie Winling.

Le Palazzetto Bru Zane (que ferait-on sans lui?) exhume cette saison de nombreuses partitions de Félicien David : on a ainsi pu entendre Herculanum en mars à Versailles, Moïse au Sinaï en Bulgarie, Auvergne et Grèce, et Le Saphir reste à entendre aux Bouffes du Nord le 19 juin, comme Christophe Colomb en août au festival Berlioz de La Côte-Saint-André. On n'attend plus qu'une reprise scénique du charmant opéra comique Lalla-Roukh !