Re: Chanteur pro
DE | : | Alain Zürcher |
LE | : | 03/03/2004 à 14:29 GMT |
Yves Ormezzano a écrit :
<< - être conscient de ses propres possibilités
- et qu'elles soient en adéquation à ses aspirations>>
Une chose me frappe, mais elle est je crois en train de changer positivement
: il y a quelques années, tout chanteur en herbe voulait être "jeune
premier", c'est à dire non seulement chanter des rôles de premier plan mais
aussi des rôles "sérieux", "nobles", avec une belle technique lyrique etc.
D'où une recherche un peu stérilisante et nivelante d'une sorte de
perfection standard...
Or une bonne partie des rôles à distribuer sont non seulement des seconds
rôles mais aussi des rôles de caractère, des personnages qui sont plus
efficaces en étant "typés" de manière un peu exagérée qu'en étant incarnés
par de pâles copies d'un idéal de bel canto.
Il me semble qu'à certaines époques, on s'est pris moins au sérieux et on a
mieux accepté de jouer de ses défauts. Se définir un personnage, un "type" à
partir de ses caractéristiques personnelles, et donc en bonne partie de ses
défauts, était une voie très importante et pratiquée vers la réussite d'une
carrière. C'était aussi le cas au music-hall, au théâtre, au cinéma.
Cela exige d'ailleurs une grande culture, car c'est aussi un jeu par rapport
à des références, il ne s'agit pas de faire n'importe quoi. Cela requiert
aussi de grandes qualités d'expression, à la fois un "laisser aller" ou
"laisser surgir" général et une grande rigueur.
Si 100 élèves en chant aspirent au même idéal un peu abstrait, il en restera
99 sur le carreau. Mais si chacun essaie de développer sa voix, son style
vocal, ses emplois vocaux et donc sa carrière à partir de sa personnalité et
de son patrimoine vocal, un nombre peut-être plus important arrivera à faire
quelque chose d'intéressant et à trouver sa place et son public.
Les metteurs en scène ont aussi un grand rôle à jouer : les meilleurs savent
s'appuyer sur la personnalité de chacun et révéler à chacun des facettes
encore inabouties de son potentiel. Et pourquoi pas en faisant jouer à
chacun des "types" (à la Deschiens...) plutôt que des individus...
Mais c'est comme pour les profeseurs de chant : certains réussissent en
plaquant un système unique sur tous, ce qui est un procédé de marketing
certes plus simple et donc efficace (le Coca-Cola est le même partout) -
efficace en tant que procédé de marketing et non de moyen d'épanouissement
de chacun et de plaisir donné au public.
Le travail réalisé avec les élèves du CNSMDP par Lukas Hemleb et maintenant
Emmanuelle Cordoliani semble tout à fait s'inscrire dans cette voie, à la
différence d'expériences précédentes moins concluantes.
| Alain Zürcher
| L'Atelier du Chanteur
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