Alceste OC
Théâtre des Champs-Élysées • Paris • 22/03/2006
La Grande Écurie et la Chambre du Roy
Choeur de chambre de Namur Chef de choeur : Jean Tubéry Jean-Claude Malgoire (dm) |
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Alceste de Lully a toujours accompagné Jean-Claude Malgoire depuis 1973. C'est donc tout naturellement qu'il a choisi cette oeuvre pour fêter ses 50 ans de carrière au Théâtre des Champs-Élysées. Ce même théâtre avait déjà accueilli une production scénique de Jean-Louis Martinoty dirigée par Malgoire fin 1991. On se souvient aussi de sa version du Châtelet en 1987, l'année d'Atys pour le tandem Christie-Villégier. Aucune de ses versions enregistrées n'est par contre disponible actuellement.
Alceste est une tragédie bien construite, même si elle souffre ce soir de l'absence de mise en scène. Après un prologue et un premier acte vivants et idiomatiques, le deuxième acte s'essouffle un peu, avant que l'intérêt ne soit renouvelé après l'entracte. Le très beau choeur de chambre de Namur et la Grande Écurie et la Chambre du Roy créent une belle variété de climats. Certains mouvements pourraient cependant être plus toniques si tous les interprètes étaient mieux calés sur une pulsation unique et si les départs étaient plus précis.
Le concert de ce soir était l'occasion d'entendre deux générations de chanteurs fidèles à Jean-Claude Malgoire.
Parmi les anciens, Bernard Deletré séduit toujours par son émission franche et bien conduite, sa voix à la fois ample et claire, sans un soupçon de grossissement. Son grand métier lui permet de s'amuser et d'amuser avec une version bouffe du célèbre air de Caron "Il faut passer tôt ou tard". Nicolas Rivenq est moins avantagé par le rôle un peu grave pour lui d'Alcide. Alain Buet a un bon naturel vocal méridional, mais sa vocalisation serait plus agile s'il ne "plaçait" pas à l'excès sa voix "dans le timbre", ce qui la prive d'une part de sa liberté et de son rayonnement. Véronique Gens n'a plus sa délicieuse onctuosité, connaissant peut-être une méforme passagère. Sans la continuité de l'incarnation scénique, il est vrai que son rôle est réduit à des bribes, certes belles mais difficiles à rendre réellement touchantes.
Parmi les nouveaux, Stéphanie d'Oustrac est superbe comme à son habitude, après un prologue à l'émission un peu tassée et "dans les joues", au phrasé déclinant convenant certes à la déploration. Judith Gauthier a un joli timbre fruité sans trop d'acidité. Hjördis Thébault a une émission un peu serrée. Pierre-Yves Pruvot programmé chante un truculent Ragueneau à Montpellier. Jean Delescluse le remplace fort différemment. Il ne caricature pas du tout la vieillesse de Phérès, ce dont on est presque frustré. Renaud Delaigue affiche un superbe timbre plein et chaud et de beaux graves presque pas grossis.
Simon Edwards brutalise souvent son instrument. Ses aigus forcés en sont voilés et ses phrasés manquent de souplesse. L'émission de James Oxley est également assez poussée et dure. Ses aigus sont désagréablement ouverts.
À écouter le 27 mai à 20h sur France-Musique. Dernier opéra du jubilé Jean-Claude Malgoire au Théâtre des Champs-Élysées : Les Indes Galantes de Rameau le 10 mai 2006.
Alain Zürcher