Nora Gubisch R
Auditorium du Musée d'Orsay • Paris • 16/11/2006
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Ce n'est hélas que pour ses trois dernières mélodies de Duparc que Nora Gubisch a retrouvé son timbre et sa souplesse vocale. Toute la première partie de son récital a été plombée par une émission lourde et comme déjà vieillie - simple égarement passager ou conséquence d'excès opératiques par une voix qui paraissait pourtant naguère si saine et solide? (Dans Salammbô de Fénelon, Perelà de Dusapin, K de Manoury, ou encore la saison dernière dans le Château de Barbe-Bleue de Bartok.) Ses "r" grasseyés ne semblent pas non plus favoriser la liberté de son émission.
Ses aigus, comme excessivement couverts et retenus, peinent alors à décoller et atteindre leur justesse. Notes aiguës, finales et tenues semblent requérir un effort excessif par rapport au résultat offert. Dans Testament par exemple, "merci" et "mort" sont tendus et pas très justes.
Quand elle donne plus de brillant à sa voix, c'est par l'ajout d'un métal quelque peu artificiel et grimacé. Cet écartèlement compensatoire entre lourdeur et métal est très éloigné de l'équilibre idéal du chiaroscuro ! Ce déséquilibre est bien incarné dans la différence entre ses "i" et "é" trop brillants et ses "o" émis avec une bouche trop ouverte et arrondie au niveau des lèvres "au dernier moment".
Le piano d'Alain Altinoglu semble par contraste d'autant plus léger, manquant de la profondeur de pâte sonore que Nora Gubisch cultive peut-être avec excès.
Élégie est moins forcé, Phidylé est magnifique comme Extase. Alain Altinoglu semble plus profond, Nora Gubisch à la fois plus "dedans" musicalement et "au-dessus" vocalement, s'étant enfin extraite de cette pesanteur un peu affaissée (également dans sa posture). Elle commence bien la Vie antérieure, puis trafique des "houles" trop tubées suivies de voyelles antérieures trop "dans le masque". à partir de "c'est là", elle retrouve son naturel et termine en beauté.
Trois bis espagnols rappellent le programme donné ici-même il y a plusieurs années par Nora Gubisch, dans une forme vocale alors plus impressionnante. Elle y est brillante sans grimaces, et une relative légèreté permet un épanouissement plus libre mais plein de ses voyelles.
À écouter le 26 décembre 2006 à 15h sur France-Musique.
Alain Zürcher