Re: Stage Richard MILLER
DE | : | Alain Zürcher |
LE | : | 21/06/2003 à 15:59 GMT |
Christian Guérin a écrit :
<< J'ai eu grand plaisir à participer au stage de technique vocale donné par
Richard MILLER à Dunkerque >>
Merci pour vos remarques ! Je suis étonné de son succès public, car au CNSM
il n'avait attiré presque personne. Il est vrai qu'il fallait se glisser
parmi les élèves et les profs, puisque c'était en principe "privé". Comme
d'habitude dans cette institution, les élèves s'en fichaient un peu et
avaient autre chose à faire, et les profs "non millériens" ont royalement
snobé sa masterclasse, apparemment surtout sollicitée par Dumé et Le Bris.
J'avais quand même été choqué par son aigreur et son manque de pédagogie vis
à vis de certains élèves, qu'il accusait pratiquement de faire exprès de ne
pas comprendre et appliquer ce qu'il demandait ! Mais être confronté à un
relatif désintérêt, sans que personne n'enregistre sa masterclasse ou ne
prenne même de notes (sauf moi, comme d'habitude ! :-), ce devait être
énervant quand on a sa réputation.
<< 1/ sur la respiration, il montre que ses côtes continuent de s'élargir
alors
qu'il commence à chanter; mais il n'explique pas d'où vient l'air ainsi
expiré, car sa bedaine cache ses abdominaux, lesquels, il faut bien
l'admettre, repoussent le diaphragme pour faire sortir l'air. >>
Sur le diaphragme et les abdominaux, c'est vrai qu'il n'a jamais été
clair... D'un côté il parle de "lotta vocale" et donc d'antagonisme, mais
comme par ailleurs il refuse d'accepter que l'on puisse agir volontairement
et directement sur le diaphragme, il réussit le tour de force, dans Training
Tenor Voices, de parler d'antagonisme sans parler du diaphragme
(inspirateur) en tant qu'antagoniste des abdominaux (expirateurs).
Et dans la Structure du Chant (
https://chanteur.net/biblio.htm#Miller), plus
ancien, il semble croire dans les vertus miraculeuses du "maintien de la
position d'inspiration" (au niveau des côtes, peut-être parce qu'il ne
maîtrise pas personnellement son diaphragme), donnant parfois presque l'idée
que l'on peut chanter sans aucune action expiratrice... Or si l'on ne fait
"rien" ou si l'on croit ne rien faire, il y a de grandes chances que ce soit
la cage thoracique qui s'affaisse, ou l'ensemble du torse qui se dégonfle un
peu au petit bonheur, ce qui ne permettrait de chanter valablement que de la
variété ou de la musique médiévale...
C'est vrai aussi que Miller a un physique très particulier, très trapu, avec
une cage bien ouverte, une bedaine effectivement, un cou large et court...
L'ouverture thoracique a dû être assez évidente pour lui, et ce n'est pas
par hasard qu'il a introduit ensuite dans ses textes des remarques sur les
différences induites par des hauteurs de cage thoracique différente, des
espaces plus ou moins grands entre le haut du bassin et le bas de la cage et
sur la longueur des cous ! Sans doute a -t-il découvert, en enseignant, que
tous n'avaient pas la facilité qui lui a été donnée par sa morphologie.
Être bien "enrobé" a aussi toujours facilité les questions de "soutien" par
la simple force de gravité des viscères qui maintiennent le diaphragme bas
et rende spontanée ou facile la détente des abdominaux lors de
l'inspiration.
Quant Miller s'allonge sur le dos, il a aussi besoin d'au moins deux
annuaires pour soutenir sa tête, alors que d'autres peuvent la poser
confortablement à plat ou sur un livre de poche. Cela a aussi son influence
dans l'alignement général du corps.
<< 2/ sur les voyelles, il a réussi le tour de force de faire chanter en
français une semaine sans jamais aborder la voyelle spécifique franco-
germanique du "u"(y phonetique).>>
En 1994 à la Schola Cantorum, il ne distinguait pas un "é" fermé d'un "è"
ouvert ! Depuis, il a quand même évolué et introduit dans sa pédagogie
d'autres voyelles que ces prétendues "5 voyelles pures" de l'italien!
<< il n'a pas souhaité aborder le problème de la préservation de la tonicité
du larynx par la couverture des sons. Ses idées ne semblent pas claires sur
ce point.Il ne rencontre plus de chanteurs débutants ou en difficulté.>>
Dans la Structure du Chant, il aborde la question de la couverture
uniquement sous l'angle de la modification vocalique, et en défendant un
"aggiustamento" italien par opposition à une "Deckung" allemande plus
radicale. Mais là comme sur de nombreux points, ses propos sont le produit
de la recherche intelligente d'une formulation juste mais un peu idéaliste,
qui a le défaut de n'offrir que peu de pistes concrètes de travail.
Dans "On the Art of Singing" (
https://chanteur.net/biblio.htm#Miller1996), il
écrit carrément qu'il suffit d'ouvrir davantage la bouche dans l'aigu et la
voyelle se modifiera convenablement et suffisamment!
Mais ce recueil inclut quand même un très intéressant article sur la
couverture des sons, le n°3, "Covering in the Singing Voice", qui va
beaucoup plus loin que la "Structure du Chant".
Dans "Training tenor voices", il part toujours de la modification vocalique,
mais élargit sa palette, allant jusqu'à écrire que certaines voix doivent
ouvrir, d'autres fermer leurs sons, qu'il faut en somme essayer et voir ce
qui marche... La sagesse du grand âge? :-)
Il est vrai que de ses ouvrages, seul un a été traduit en français. Sur
amazon.fr, on peut déjà commander son prochain bouquin qui paraîtra en ...
novembre 2003 ! Il porte un titre comme "Tricks for singers" - non, je
plaisante car Miller n'aime pas les "tricky teachers", mais je crois quand
même que c'est une approche de ce genre, un peu comme "Stimmfehler,
Stimmberatung" de Lohmann en allemand, une liste de
"diagnostics/prescriptions" ou de "questions/réponses". Peut-être y
sera-t-il plus concret que jamais?
| Alain Zürcher
| L'Atelier du Chanteur
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