Le théâtre des Bouffes du Nord nous permet de découvrir les dernières Révélations Classiques de l'ADAMI : quatre chanteurs et quatre instrumentistes se produisent en solo mais aussi en duo et même en quatuor, dans un programme éclectique très agréable.
Sans compétence particulière pour en juger, on est cependant séduit par la fluidité et la précision rythmique du jeu du saxophoniste Alexandre Souillart, qui se produit dans de plaisantes pièces légères. Au violon, Saténik Khourdoïan déçoit par un archet bien lourd qui écrase ses cordes et transforme son violon en alto.
Malgré le choix douteux de la Passacaille de Haendel transcrite par Halvorsen pour violon et violoncelle, dans laquelle on ne sait trop quel style attendre et rechercher, la violoncelliste Camille Thomas séduit par son jeu sobre et élégant. Un peu raide en soliste, le pianiste Guillaume Vincent déploie un toucher beaucoup plus intéressant et une pulsation plus stricte en trio avec Saténik Khourdoïan et Camille Thomas. Tous trois excellent dans un trio élégique de Rachmaninov très engagé et dans un Automne de Piazzola très enlevé.
Côté chant, on retrouve deux lauréats masculins du CNSM de Paris. Déjà apprécié à sa sortie en 2009, Abdellah Lasri séduit par la même beauté de timbre et une émission bien équilibrée. En duo avec Clémence Barrabé dans Roméo et Juliette, il épaissit certaines voyelles aux dépens d'une diction compréhensible, tandis que sa partenaire a une prononciation très claire.
Alexandre Duhamel a toujours la prestance et le naturel d'un Figaro, mais aussi une émission un peu cravatée qui alourdit parfois son phrasé. à l'inverse de la mélodie Élégie de Massenet, la langue italienne et les personnages bouffe donnent plus de brillant et de vivacité à sa voix.
Élève entre autres de Daniel Delarue au CNR d'Aubervilliers, Clémence Barrabé a une voix légère mais bien connectée physiquement. Cet ancrage lui donne une énergie tranchante et efficace. Elle effectue correctement ses passages en poitrine, mais son souffle court l'oblige à des reprises de souffle parfois regrettables musicalement.
Aude Extrémo ne présente pas la même solidité technique : en l'absence d'une "colonne d'air" plus profonde, c'est souvent en bouche qu'elle appuie sa voix et cherche à amplifier son timbre. Elle semble inspirer en soulevant le thorax et chanter en le repoussant vers le bas, soit quasiment à l'opposé d'une technique vocale idéale. En duo avec Alexandre Duhamel dans L'Italienne à Alger de Rossini, elle appuie trop certaines notes graves et fins de phrase, privant ainsi son phrasé de continuité. Dans l'air de Dalila, trop lourd pour elle, elle n'a pas l'énergie de conduire jusqu'au bout des phrases non installées sur le souffle et détonne parfois.
Les quatre chanteurs forment un magnifique ensemble dans L'Élixir d'Amour. Clémence Barrabé et Abdellah Lasri y séduisent aussi par la qualité de leur émission.