Écoutes de Spectacles

Le Roi Roger OC

 • Paris • 27/04/2003
Orchestre Philharmonique de Radio-France
Choeur de Radio-France
Maîtrise de Radio-France
Jukka-Pekka Saraste (dm)
Le Roi Roger  :  Wojtek Drabowicz
Roxana  :  Tatiana Maria Pozarska
Edrisi  :  Stefan Margita
Le Berger  :  Ryszard Minkiewicz
L'Archevêque  :  Rafal Siwek
Une Abbesse  :  Jadwiga Rappé

Superbe opéra à la somptueuse orchestration !
Si l'orchestre est formidable dans les passages doux, l'acoustique du Châtelet, peut-être encore renforcée par les panneaux de bois rétrécissant le cadre de scène pour cette version de concert, durcit les 'forte' et les empêche de s'épanouir. On rêve d'entendre cette production dans une acoustique comme celle de la Philharmonie de Berlin. La saturation acoustique est ici fatigante, les timbres perdent de leur subtilité en un affrontement titanesque des masses chorale et orchestrale, entre lesquelles sont pris les pauvres solistes.
Seul l'excellent et solide Wojtek Drabowicz (qui remplace Thomas Hampson souffrant) est de taille à lutter contre ce déferlement de décibels.
Stefan Margita le serait sans doute aussi, avec son émission claire, directe mais pleine et solide, mais la partition le confronte moins aux 'tutti' que le Berger, ce qui laisse à penser que Szymanowski envisageait une voix plus légère pour Edrisi que pour le Berger, à l'inverse du choix effectué dans cette production.
Le timbre de Ryszard Minkiewicz n'est pas intrinsèquement beau mais il caractérise très bien le Berger, un peu comme un Ian Bostridge plus corsé mais un peu moins chatoyant. Hélas, sa voix n'est pas encore suffisamment corsée pour toujours passer l'orchestre.
Le rôle de Roxana est très vocalisant et presque "abstrait", rappelant beaucoup le Rossignol de Stravinsky, mais elle aussi doit affronter les 'tutti' de l'orchestre. Tatiana Maria Pozarska a un très joli timbre qui traduit bien une des conceptions possibles de son personnage (ange désincarné plutôt que ménade !), mais elle est conduite à forcer sa voix légère. Dès lors, sa voix bouge, avec un vibrato trop large, ce qui est bien dommage et inquiétant.

Sans ces quelques réserves tenant à la salle et à l'équilibre acoustique entre solistes, choeurs et orchestre, le bel engagement de toute l'équipe réunie aurait pu emporter l'adhésion d'un bout à l'autre de cette oeuvre très séduisante.