Les Arts Florissants / Actéon
Opéra Royal • Versailles • 05/10/2004
Orchestre et choeurs de l'Académie Baroque Européenne d'Ambronay
Christophe Rousset (dm) Ludovic Lagarde (ms) Odile Duboc (chg) Antoine Vasseur (sc) Jean-Jacques et Virginie Weil (c) Sébastien Michaud (l) |
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On attendait davantage de cette production de l'Académie Baroque Européenne d'Ambronay. De jeunes chanteurs présentent certes leurs faiblesses mais aussi leur fraîcheur, leur enthousiasme, leur énergie. Ludovic Lagarde n'a pas réussi à faire sortir ces qualités. Il les a au contraire corsetées dans des mouvements rigides, où l'expression des sentiments ne trouve pas non plus son compte. Les danseurs guidés par Odile Duboc s'en sortent un peu mieux.
Le décor se limite à une cage grillagée. Les costumes sont pour partie neutres et passe-partout (les robes de couleur des solistes des Arts Florissants), pour partie fort plaisants (les robes imprimées de femmes nues des nymphes d'Actéon), pour partie hideux (les costumes de plastique noir des choristes des deux oeuvres).
Si Actéon est une oeuvre intéressante à mettre en scène dans le cadre d'une académie, Les Arts Florissants requièrent soit des interprètes superbes, soit une mise en scène ou en espace plus inventive. Prologue d'un tragédie que l'on attend en vain, ils rappellent ce soir ces opéras français où une oreille italienne, n'entendant qu'un interminable récitatif, attend en vain un air qui ne vient jamais. Quoique minimaliste, la mise en scène de Ludovic Lagarde n'en est pas moins pléonastique par rapport à la musique.
Vocalement, le choeur final d'Actéon sonne très bien, alors que les ensembles avaient jusque là sonné un peu étriqués. Les tenues sur "i" ou "è" mériteraient plus de rondeur.
Les voix solistes des Arts Florissants sont globalement légères et serrées, mais celles d'Actéon sont intéressantes. Quand le titulaire du rôle titre (Paul Cremazy) ne force pas ses forte, son émission mixte le promet à un bel avenir. Junon (Sophie Van De Woestyn) donne enfin à entendre une voix ample et pleine. Diane (Karen Perret) tient bien son rôle.
Le recrutement vocal semble privilégier les voix "propres" mais d'un potentiel et d'un engagement physique limités. Ne risque-t-on pas ainsi, en visant un résultat "joli" et présentable à court terme, de reproduire les limitations, que l'on croyait révolues, de la première génération de chanteurs baroques?
International, le recrutement permet d'initier des chanteurs étrangers à des oeuvres typiquement françaises. Leur français s'améliore en cours de soirée, parallèlement à leur aisance scénique et vocale.
Le son de l'orchestre est un peu sec, ses phrasés sont un peu courts. Si les musiciens suivent Christophe Rousset dans les tempi les plus rapides, les changements de rythme et de tempo engendrent souvent quelques secondes de flottement. L'acoustique du superbe Opéra Royal du château de Versailles est bonne, mais les interprètes n'en ont pas pris toute la mesure.
Alain Zürcher