David Daniels R
Théâtre des Champs-Élysées • Paris • 07/10/2009
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David Daniels et Martin Katz nous ont offert un récital pour chant, piano et applaudissements, ce dernier instrument étant tenu avec un remarquable sens du rythme et de la nuance par le public du théâtre des Champs-Élysées. à grande voix, grand public ! Peut-être honteux de ne pas emplir la salle jusqu'au paradis, ce dernier a tenu à compenser cette relative faiblesse numérique par un enthousiasme métronomique et indéfectible, ponctuant chaque morceau et réussissant même parfois à ravir au pianiste le plaisir de le conclure. Pour "Cara sposa", notre public interprète a même brillamment interrompu ses deux collègues avant même la reprise da capo.
Les deux autres interprètes de la soirée n'ont pas démérité non plus, en proposant le programme le plus éclectique qui soit. Cheval de bataille des contre-ténors, Haendel est tout de même convoqué pour deux airs, l'un tendre et l'autre vif. Dans le premier, David Daniels expose un vibrato un peu large et un timbre ayant perdu de sa rondeur. Un chroniqueur se voulant spirituel dirait qu'il remplace les sons filés par un filet de son. "Furibondo spira il vento" est aussi un peu court de souffle et sec de timbre.
C'est dans les arie antiche que la voix de David Daniels s'épanouit le plus pleinement. Quand les récitalistes de jadis les plaçaient en début de programme, lui les fait précéder par plusieurs Lieder de Brahms qui sonnent plus étiques. Son legato est meilleur en italien, reliant les voyelles plutôt que les consonnes. Les mélodies de Hahn qu'il choisit ensuite sont, pour trois d'entre elles, de la veine "néo-baroque" du compositeur, dont des contre-ténors comme Robert Expert se sont fait une spécialité. à son excellent français, on ne peut reprocher que la transformation inopportune de "j'entends" en "j'attends" (à Chloris) et de "emmener" en "amener" (Paysage). Les romances anglaises qui closent le programme ne rehaussent pas l'idée que l'on se fait du génie musical britannique avant Benjamin Britten. Si Where coral lies d'Elgar est joli, les chansonnettes de Quilter sont toujours aussi insupportablement pâles et sucrées.
Les tonalités du programme sont judicieusement choisies pour que David Daniels n'ait presque jamais besoin de poitriner. En bis, Pur dicesti o bocca bella de Lotti ne révolutionne pas davantage l'interprétation musicale que les airs anciens précédents. L'absent de Gounod fait trouver à David Daniels une chaleur de timbre bienvenue. Il conclut malheureusement cette mélodie sur une note tenue trop basse, comme souvent au cours de la soirée. On ne ressort pas de ce récital davantage convaincu de l'apport d'un contre-ténor aux répertoires non destinés à sa voix - si tant est que le répertoire des castrats le soit, mais c'est une autre histoire !
Alain Zürcher