Farnace OC
Théâtre des Champs-Élysées • Paris • 28/04/2011
Stefano Molardi (dm)
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Aux amateurs de Vivaldi, le TCE propose ce Farnace interprété par I Virtuosi delle Muse, ensemble fondé en 2004 et toujours dirigé par Stefano Molardi. Bien placide au premier acte, il ne soutient guère les chanteurs - ainsi dans le joli air de Selinda, où le phrasé et le tempo de Raffaella Milanesi semblent plus intéressants que les hésitations languissantes qui l'accompagnent à l'orchestre. Mais ce premier acte étant d'une remarquable absence d'inspiration, les choses s'arrangent au second et au début du troisième, où Vivaldi a réuni quelques tubes avant que la fin de l'oeuvre ne sombre à nouveau dans la routine.
Vivaldi a remis sur le métier Farnace pas moins de sept fois, pour des villes, des théâtres et des distributions différentes. De ces versions, deux subsistent, dont la plus récente seulement en partie, mais c'est celle qui a semblé la plus intéressante aux concepteurs de ce concert. Ils ont donc complété cette version tardive par des éléments de l'autre. Est-ce pour cette raison que Gilade chante un premier air de mezzo avant de se voir attribuer le léger Quel usignuolo? Ce dernier air ne provient-il pas d'Arsilda? Farnace a parfois aussi inclus Sorge l'irato nembo d'Orlando furioso. Nous n'y avons pas droit ce soir, mais par contre au saisissant Gelido in ogni vena qui provient de Siroe. C'est d'ailleurs, au deuxième acte, le premier air qui dégage une réelle émotion, communiquée par une Sonia Prina inconsistante jusque là, enfin présente et intense comme elle sait l'être.
En Tamiri, rôle créé par Anna Girò, Josè Maria Lo Monaco sonne sourd au premier acte, avant d'ajouter un peu de brillant à la belle rondeur de son grave. à l'instar d'une Cangemi, elle excelle dans le pathétique. Maria Grazia Schiavo se réveille également pour son premier grand air. Son émission est bien concentrée et conduite, malgré des aigus un peu ouverts et lâchés au petit bonheur.
Semblant peu concerné par son rôle, Anders J. Dahlin ânonne des récitatifs avant de se confronter au périlleux Roma invitta à la tessiture impossible. Ne serait-il pas judicieux de chanter les aigus de cet air en fausset, pour peu que l'on travaille à les relier au reste de l'air émis en voix pleine?
Sabina Puértolas a des postures habituelles très étranges qui privent sa voix de liberté. Sa respiration est haute et son timbre assez nasal. Emiliano Gonzalez Toro émet sa voix de manière un peu trop placée et appuyée dans le nez. Son legato comme sa beauté vocale en souffrent.
Par rapport à ses collègues, Raffaella Milanesi séduit par son naturel de posture et de timbre. Ses ouvertures buccales raisonnables lui permettent de conserver une bonne définition vocalique. Il en résulte une ligne vocale plus fine et mieux conduite.
Les solistes chantent également de brefs choeurs musicalement peu intéressants, avec des voix s'accordant très mal. Le diapason choisi n'est-il pas trop bas? Toutes les voix féminines gagneraient à chanter un peu plus haut.
Le livret invraisemblable enchaîne les airs de comparaison les plus banals. Chacun y passe d'un extrême à l'autre, veut s'assassiner à qui mieux mieux puis se réconcilie deux minutes avant la fin. Pour le coup, une mise en scène franchement parodique aiderait peut-être à faire passer la pilule.
Les inconditionnels de cette oeuvre pourront la réentendre la saison prochaine, le 10 janvier 2012, jouée par I Barocchisti de Diego Fasolis, avec une distribution vocale totalement différente à l'exception d'Emiliano Gonzalez Toro en Aquilo.
Alain Zürcher