Oberto OC
Théâtre des Champs-Élysées • Paris • 17/11/2011
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Oberto, premier opéra connu de Verdi, est un exercice d'école ! On pense, en l'écoutant, à Ravel pastichant, pour sa cantate du Prix de Rome, l'écriture conventionnelle de ses jurés ! Tous ces clichés existaient avant Verdi, mais il les portera à un point d'accomplissement rare avant de montrer, avec Falstaff, qu'il est aussi capable d'un peu de finesse. Les ficelles sont ici si grosses qu'elles en deviennent comiques. Nous sommes dans la cuisine de l'artisan, faisant entendre successivement son thème à chaque instrument, puis faisant entendre chaque chanteur sagement à son tour dans l'air d'entrée que sa vanité réclame - car le livret, ramassis de recettes réchauffées, ne réclame pas plus qu'il n'offre.
Côté musical, on entend encore beaucoup de Rossini, du Bellini dans les passages plus élégiaques, finalement assez peu de Donizetti mais une dose étonnante d'opéra comique français ! On entend aussi déjà des tics et tubes verdiens, comme au début du second acte le violoncelle de l'air de Philippe II dans Don Carlos, ou dès l'ouverture la fête de la Traviata. L'un des thèmes principaux évoque (inspirera?) le "Comme autrefois dans la nuit sombre" des Pêcheurs de Perles de Bizet. Et Donizetti lui-même sera bien plus inspiré, quatre ans après Verdi, pour le "O Lisbona" de Dom Sebastiano, qui décalque le "O patria" d'Oberto.
La musique étant facile et agréable et la direction alerte, on se croit transporté salle Favart. à la fin de chaque numéro, une cadence interminable et platissime semble sortie d'un sketch.
L'oeuvre recèle tout de même des ensembles bien écrits, un trio au premier acte et un quatuor au second. Au second acte, le ténor puis la soprano chantent deux belles plaintes d'inspiration bellinienne.
Si l'orchestre et le choeur magnifiquement clair sont à leur aise, il n'en va pas de même des chanteurs. La distribution est rendue encore plus hétéroclite par le remplacement du ténor, indisposé, par Valter Borin. L'émission de ce dernier est un peu bouchée et sous pression. Sophie Pondjiclis assure bien son rôle. Michele Pertusi est toujours superbe de noblesse et de chiaroscuro. Ekaterina Gubanova a une très belle voix qu'on lui souhaite de conserver longtemps sans trop l'élargir. Maria Guleghina présente les restes impressionnants d'une grande voix et d'une technique à l'ancienne, qui rappelle parfois Edita Gruberova applaudie ici-même il y a deux ans. Son rôle exigeant requiert des graves ET des aigus. Les premiers sont un peu empâtés et les derniers sont émis à l'arraché, sans aucune liaison avec le reste de sa voix. Son médium reste cependant timbré et riche, sans trémolo.
À écouter le 19 novembre 2011 à 20h au Théâtre des Champs-Élysées ou en direct sur France-Musique.
Alain Zürcher