The Second Woman
Bouffes du Nord • Paris • 22/12/2012
Ensemble Court-circuit
Jean Deroyer (dm) Guillaume Vincent (ms) Marion Stoufflet (dr) James Brandily (sc) Fanny Brouste (c) Sébastien Michaud (l) |
|
Fort de son Grand Prix de la Critique en tant que "Meilleure Création d'un compositeur français" en 2011, The second woman méritait d'être repris pour trouver le public qui l'aurait raté lors de sa création. Il s'agit d'un spectacle complexe, unifié sur le plan sonore par l'amplification permanente (complétée par l'échantillonnage et la répétition), sur le plan visuel par le lieu et les rideaux qui lui ont été ajoutés (pour mieux les faire tomber), sur le plan humain par ses interprètes, lesquels ont nourri l'écriture au fil des répétitions... Répétitions et coulisses sont au coeur du spectacle, comme la confrontation entre les interprètes (avec leurs états d'âme pas forcément passionnants) et leurs rôles (pas très définis puisqu'on répète).
C'est l'éternel duel entre la voix "lyrique" et la voix de "variété", chacune ayant ses adorateurs et ses détracteurs, mais la chanteuse pop est forcément plus sexy, elle sait bouger son bassin, elle ! Dans son registre, chacune est contrainte de jouer d'abord sa propre caricature : Jeanne Cherhal qui crie sur la gorge dans un mauvais anglais, Elizabeth Calleo qui doit émettre un son "lyrique" ampoulé... Puis chacune a le droit de bien chanter, toujours dans son style, et Elizabeth Calleo a enfin l'autorisation, consécration suprême, de montrer qu'elle peut aussi chanter en voix de poitrine et sans vibrato !
Un "metteur en scène" est l'occasion de quelques scènes bien caricaturées. L'histoire (répétée sans peur de l'ennui) tourne autour d'une vague trame de viol de la soeur brune de la soprano blonde, elle aussi soprano, et même, dit le programme, "colorature". C'est l'occasion d'échantillonner le duo des fleurs de Lakmé et autres tubes lyriques, avec d'amusants effets de décalages entre les voix. à part ça, on ne sait pas trop quel est le style propre de Frédéric Verrières, dont l'orchestre apparaît enfin quand la cantatrice neurasthénique blonde fait tomber le rideau. Une filiation Steve Reich - John Adams? La réalisation visuelle, quant à elle, serait sans doute plus séduisante en n'étant pas placé sur l'extrême côté de la scène, derrière le piano.
Une recherche intéressante sinon originale, apte à séduire sans doute davantage un public venant du théâtre, mais en tout cas aussi riche que n'importe quelle commande de l'Opéra de Paris.
Alain Zürcher