Écoutes de Spectacles

Le Jardin des Voix CE

 • Paris • 22/11/2017
Natalie Perez, soprano
Natasha Schnur, soprano
Eva Zaïcik, mezzo-soprano
James Way, ténor
Josep-Ramon Olivé, baryton
Padraic Rowan, baryton-basse

Le Jardin des Voix a présenté son excellent cru 2017 à la Cité de la Musique. Ces six chanteurs déjà bien lancés dans la carrière ont suivi un stage intensif à Thiré cet été, où ils ont donc rejoint les vrais jardins de William Christie. Le programme qui en est issu est remarquablement composé par William Christie et Paul Agnew, qui codirige l'Académie. Quoi de mieux que de le publier ci-contre in extenso ? Avec de rares interludes orchestraux, c'est un florilège varié de la musique baroque anglaise, de la plus comique à la plus éthérée.

The cryes of London de Gibbons est l'équivalent anglais et moins complexe des Cris de Paris de Janequin. "O the pleasure of the plains" permet aux chanteurs de montrer leur agilité. The singing club de Arne est un catch, canon burlesque pour voix d'hommes où un malheureux baryton s'exerce à vocaliser avec autant de succès que Frantz dans les Contes d'Hoffmann. Il permet à Josep-Ramon Olivé et à ses condisciples de démontrer leurs talents scéniques. Par contraste, Music divine de Tomkins est une sublime pièce polyphonique a cappella, comme en deuxième partie l'envoûtant "Come sable night" de Ward. La capacité des six chanteurs à s'insérer dans un ensemble, capacité aussi recherchée dans le monde baroque que les qualités solistes, est ainsi parfaitement démontrée. Les trois hommes proposeront à nouveau une suite d'airs à boire de Purcell, que la riche voix de Padraic Rowan couronnera d'un bel air d'ivresse, "Bacchus is a power divine". Josep-Ramon Olivé chante aussi un amusant "Wondrous machine" adressé au basson.

James Way, quintessence de ténor, chante excellemment son solo "Sharp violins". En deuxième partie, son "One charming night" est plus inconsistant de timbre et de ligne. Les deux sopranos sont très différenciées de timbre et de conduite de la voix. Natasha Schnur est touchante et expressive mais peu puissante. La voix de Natalie Pérez est solide mais manque un peu de focus dans "Now the night is chased away". Mais c'est leur collègue mezzo-soprano qui nous séduit tout au long de la soirée, d'abord avec un beau "Strike the viol", où les instrumentistes aussi sont mis en espace, ensuite avec "Welcome, blacke night" ou elle est touchante et captivante sans se départir de sa simplicité, et enfin avec le splendide grand air "As with rosy steps the morn", où elle impose encore sa présence tranquille et son legato.

Au cours de la soirée, un petit drapeau britannique patriotiquement agité par le ténor est un leitmotiv amusant, ses collègues brandissant en réponse de grands drapeaux européens !