Juditha Triumphans O
Théâtre des Champs-Élysées • Paris • 27/05/2009
Andrea Marcon (dm)
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Andrea Marcon a réuni une excellente équipe pour offrir une Juditha Triumphans toute en nuances, dont l'intérêt ne faiblit jamais. Après Emmanuelle Haïm avec La Resurezzione, il démontre combien un oratorio peut être dramatiquement efficace sans l'aide d'aucune mise en scène. Sans tambours ni trompettes non plus, avec un tempo certes très agile pour "Armatae face" mais en assumant pleinement les nombreux airs "calmes" de la partition, que l'on s'étonne de trouver plus passionnants les uns que les autres.
L'écriture du jeune Vivaldi est étonnamment variée ! En témoignent les nombreux airs où la voix de Juditha dialogue avec un instrument de l'orchestre. L'air de Vagaus "O servi, volate" est lui accompagné par les seuls luths et les violoncelles pizzicato. En deuxième partie, les violons joués pizzicato épaulent aussi le luth pour l'air de Juditha "Transit aetas". Le plus délicieux est sans doute le suave salmoè (en français chalumeau !) soprano qui figure la tourterelle dans l'air de Juditha "Veni, me sequere fida". Parmi les beaux airs calmes, Holopherne chante "Nox obscura", Juditha "Vivat in pace" et Vagaus "Umbrae carae" accompagné de flûtes.
Les voix choisies sont bien adaptées et suffisamment différenciées. Déjà admirée ici-même cette année dans Ercole sul Termodonte, Romina Basso est une superbe Juditha. Son émission très particulière est efficace. Pour placer sa voix en début de soirée, elle combine une grande ouverture par derrière et une grande activité des lèvres dans des ouvertures buccales réduites et latérales, en insistant sur les "s" bien sifflants ! Une fois rassurée sur ce placement vocal, elle assouplit et varie son émission, tout en la maintenant très concentrée, sombre mais sans grossissement. Sa suivante Marina Comparato a une voix plus claire. Karine Gauvin apporte une touche plus brillante et vocalise bien dans le rôle de Vagaus. Mary-Ellen Nesi est un Holopherne de bonne tenue. Pas très juste dans son premier air, Alessandra Visentin se rattrape dans son air final, tout en conservant une émission nasale et un peu "en arrière".
Alain Zürcher