La scala di seta
Théâtre des Champs-Élysées • Paris • 26/04/2011
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Le TCE invite cette production créée en 2001 et reprise cette année à l'Atelier Lyrique de Tourcoing. Hjördis Thébault et Pierre-Yves Pruvot étaient déjà de la création, c'est même là que ce couple à la ville s'est rencontré ! La mise en scène de Christian Schiaretti n'a pas pris une ride. Sans prétention ni détournement, elle campe bien les personnages, truculents à souhait. Ugo Guagliardo s'impose en séducteur arrogant. Pierre-Yves Pruvot est un idéal valet stupide et vaniteux qui semble avoir visionné des films de Laurel et Hardy pour étudier son rôle.
Les décors de Renaud de Fontainieu offrent, dans un style Empire, la structure requise par le théâtre de boulevard : des portes qui sont ici comiquement invisibles, pour entrer et sortir mais aussi frapper et regarder par le trou de la serrure, et des cachettes pour espionner, en principe des "cabinets" mais eux aussi invisibles. Même la table sous laquelle doit se cacher Germano n'est qu'un trop petit guéridon : il se cache donc en se posant le napperon sur la tête. Le spectateur est ainsi rendu complice de ces artifices de farce, dont la bêtise conventionnelle, en étant outrée, est aussi désarmorcée.
À côté des excellents costumes d'Annika Nilsson, il faut aussi mentionner Nathalie Charbaud au maquillage, qui creuse les traits des personnages comme des caricatures de Daumier.
Jean-Claude Malgoire a réuni un plateau de jeunes chanteurs très séduisants et bien typés, moins excitant que pour Tancredi en 2009 mais plus homogène que pour Ciro en 2008. Leonardo de Lisi est le ténor de caractère requis, Juan Antonio Sanabria un ténor léger qui assure bien son grand air. Ugo Guagliardo a le "creux" d'une basse, mais sans grossissement et avec aussi beaucoup de métal, bref le chiaroscuro parfait, comme Pierre-Yves Pruvot au timbre très riche mais naturel. Ruth Rosique déçoit un peu en adoptant une position haute du larynx qui a tendance à étrangler et blanchir sa voix, surtout dans les aigus qu'elle ouvre trop.
Le quatuor central, comme l'ouverture, est quelque peu handicapé par les limites de l'agilité de l'orchestre. Les germes de l'implacable mécanique rossinienne en sont rendus moins perceptibles et moins jouissifs. Le grand air double de Germano est également chanté avec des ralentis et certains empâtements dans l'ornementation, qui le rendent moins convaincant qu'en 1999 à Royaumont, quand Pierre-Yves Pruvot le chantait sous la baguette ô combien experte d'Alberto Zedda.
Alain Zürcher