Castor et Pollux OC
Opéra Comique • Paris • 21/03/2014
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L'année Rameau est lancée à l'Opéra Comique ! Entre deux représentations de Platée, le jeune ensemble Pygmalion donne une version de concert de Castor et Pollux. On y retrouve Bernard Richter, découvert à Freiburg et plusieurs fois apprécié depuis, qui tenait déjà avec le même ensemble le rôle titre de Dardanus, donné en concert en 2012 puis enregistré chez Alpha. à nouveau, c'est une version remaniée par Rameau qu'a choisi Raphaël Pichon, celle de 1754.
La force de cette soirée provient avant tout de la qualité du choeur et de l'orchestre. Le niveau instrumental de l'orchestre, composé de jeunes instrumentistes, est remarquable. Il reste un passionnant chemin à parcourir pour faire une meilleure utilisation musicale et dramatique de ce potentiel. Les nuances et couleurs peuvent certainement être encore variées, le public peut être plongé dans des atmosphères plus prenantes et contrastées, tour à tour amolli de délices et glacé d'horreur !
Le choeur est d'une lisibilité merveilleuse. On comprend même mieux son texte que celui des solistes ! Le niveau vocal de chacun semble excellent, tout en se réunissant dans un ensemble musicalement parfait. Les timbres se complètent dans un équilibre parfait et non par un nivellement frustrant. Si la précision des attaques rejoint celle de l'orchestre, la variété des climats est même supérieure.
Côté solistes, on est séduit sur le papier puis déçu par le début de la soirée, où plusieurs émissions sont poussées, forcées et donc enlaidies et moins compréhensibles. La concentration et l'équilibre des émissions s'améliore peu à peu et est bien meilleure après l'entracte. Il est vrai que la troupe arrive de Besançon où elle a chanté hier, avant de la chanter à Bordeaux demain... L'acoustique de chaque salle est certainement différente, et les conditions de mise en voix et de répétition sur place n'ont peut-être pas été optimales. Pour un concert donné une seule fois, c'est cependant très dommageable.
Il y a donc peu à dire vocalement, puisque les belles qualités de la fin rendent caduques les réticences éprouvées au début. Le couple titre est potentiellement excellent. Florian Sempey a une voix très riche et sonore mais paradoxalement peu de graves. Est-il possible qu'un enrichissement presque excessif de sa résonance le coupe d'une extension plus libre dans le grave? Bernard Richter chante d'abord avec une pression excessive et une différenciation exagérée des voyelles ouvertes et fermées, puis emporte l'adhésion par le timbre brillant et insolent qu'on lui connaît. Il trouve de la souplesse pour son "Séjour de l'éternelle paix", de même que Florian Sempey dans sa scène avec Jupiter.
Agréable en Cléone, Katia Velletaz est une Suivante d'Hébé un peu tendue. Si Judith van Wanroij est une digne Télaïre, Michèle Losier, en jouant par des postures courbées la noirceur de Phébé, semble brider l'épanouissement de son potentiel vocal. Cyrille Dubois a une belle voix naturelle et claire, et Jupiter comme son Grand Prêtre tiennent très bien leurs rôles.
À écouter cet été aux festivals de Montpellier (le 24 juillet) et de Beaune (le 26 juillet).
Alain Zürcher