Don Giovanni
Volksoper • Vienne • 30/05/2004
Orchestre et choeur du Volksoper
Chef de choeur : Thomas Böttcher Elisabeth Attl (dm) Marco Arturo Marelli (ms,d) Dagmar Niefind-Marelli (c) |
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photo © Volksoper Vienne/Dimo Dimov
Voici une production exemplaire, qui témoigne de ce que l'on peut réaliser avec peu de moyens mais avec de bons choix artistiques et un bon travail d'ensemble ! Parfois spectaculaire dans ses effets scéniques et visuels, Marco Arturo Marelli vise toujours à l'efficacité et ne tombe jamais dans le décoratif, le gadget ou le "dernier cri". Le spectateur est successivement plongé dans les atmosphères convenant idéalement à l'action.
Cette action est magnifiquement soutenue par l'orchestre placé sous la direction d'Elisabeth Attl, dès l'ouverture très signifiante et contrastée. L'impact de cette ouverture est amplifié par le sablier et le pendule qui en forment sur scène le pendant visuel. Les tempi sont bien enlevés tout au long de la soirée, en contraste total avec ceux de l'anémique Flûte Enchantée mise ne scène par le même Marco Arturo Marelli et dirigée par Julia Jones au Staatsoper.
L'acoustique du Volksoper est toujours un peu étrange. Le plateau surélevé et très incliné semble plus flatteur pour les voix que l'espace scénique de Madama Butterfly, à moins que ce ne soit le fait d'être assis un peu plus en arrière au parterre, ou l'orchestre en formation légèrement plus réduite. Quand on est assis presque sous le premier balcon, des réverbérations parasites semblent parfois faire venir les voix d'où elles ne sont pas. Mais l'ensemble est acoustiquement très excitant !
Comme c'est souvent le cas dans un théâtre de répertoire où les productions alternent chaque soir, on relève quelques déplacements maladroits, quelques erreurs sans doute, et parfois un petit temps de latence avant que tel interprète se remette dans le bain. Par exemple, la sortie de Donna Anna après son entrée avec Don Giovanni n'est pas très naturelle, pas plus ensuite que les serviteurs accourus, qui s'occupent d'elle et non du Commandeur. Sans explication, on verra aussi Don Ottavio se précipiter en coulisses avant la fin de son air, un silence étonné s'en suivre, puis tout reprendre comme si de rien n'était.
Le décor crée un espace de jeu efficace simplement délimité par des rideaux et des toiles de fond. En s'ouvrant, ces rideaux dégagent par exemple la perspective d'une rue s'ouvrant vers la salle. La scène de la noce est aussi efficacement figurée par un déplacement des rideaux et une ouverture sur une toile de fond représentant un paysage de montagnes. La scène avec Masetto est efficace et très bien chantée. Le trio des masques, chanté devant le rideau, est quant à lui plus beau visuellement que vocalement. La scène de la fête est ensuite très efficace. Leporello et Don Giovanni s'enfuient par la fosse d'orchestre et la salle à l'aide d'une échelle, et reviendront par le même chemin après l'entracte ! La scène du cimetière est très bien plantée avec quelques formes en contreplaqué bien éclairées à contrejour. Pour le banquet final, le rideau devient nappe, avec un bel effet de drapé. Don Giovanni est efficacement englouti dans une brèche où la table bascule.
Le plateau vocal est magnifique d'homogénéité et d'engagement. à l'exception peut-être de Donna Anna, tous les chanteurs ont l'âge et le physique de leurs rôles et des voix à la fois fraîches et assurées. Chanter en allemand, dans la langue natale de la plupart, les met à l'aise et en valeur. Seule la sérénade de Don Giovanni est chantée en italien, avec une très bonne technique de voix mixte mezza voce.
Florian Boesch est un Leporello d'une grande autorité vocale. Ses ouvertures buccales sont excellentes et son articulation très efficace.
Elisabeth Kulman, avec sa voix corsée et bien conduite, est une Donna Elvira efficace.
Donna Ellen est une Donna Anna à l'émission un peu dure et grimacée, mais elle réussit bien les aigus et les vocalises de son dernier air.
Markus Nieminen comme Adrineh Simonian jouent très bien, de même que Klaus Kuttler qui a tout à fait le type de Masetto.
Ferdinand von Bothmer est un Ottavio solide.
Alain Zürcher