Comme chaque année, les concerts du dimanche matin de Jeanine Roze ont été lancés en fanfare par un premier concert particulièrement excitant. On a retrouvé avec grand plaisir Jennifer Larmore et l'ensemble Matheus dirigé par Jean-Christophe Spinosi, dont la complicité a été scellée lors du festival d'Ambronay 2003. C'est à nouveau l'Orlando Furioso de Vivaldi qui les réunit d'abord ici. La seconde partie du programme est consacrée à Rossini.
Si l'on était tenté de dire que l'ensemble Matheus est le meilleur interprète actuel de Vivaldi, ce concert montre que leur interprétation de Rossini a elle aussi mûri pour atteindre l'excellence. Quant à Jennifer Larmore, elle est peut-être encore plus brillante dans Rossini, qui met mieux en valeur ses aigus et le velouté de sa voix et lui offre des personnages plus espiègles.
L'ensemble Matheus séduit toujours par sa capacité à traduire tant les mouvements vifs (le premier air "Alza in quegl'occhi amore") que ceux plus tendres (le second air tiré d'Orlando Furioso, "Amorose ai rai del sole", puis l'introduction de l'air "Per lui che adoro" tiré de L'Italiana in Algeri). Il enchante d'un son fin et limpide mais toujours rond, ne manquant jamais de chair grâce à un parfait legato et un parfait ensemble.
"Cruda sorte" de l'Italienne et "Una voce poco fa" du Barbier sont offerts au public dans des versions d'anthologie. L'ensemble Matheus, avec ses phrasés longs et souples et ses timbres à la fois purs et fondus offre un contraste heureux avec l'orchestre de l'Opéra de Paris entendu la semaine passée dans cette même Italiana in Algeri.
Jennifer Larmore joue plus librement de sa voix que Vivica Genaux qui lui a succédé dans cette mise en scène. Elle va plus loin dans le charme et l'excès comique, sans jamais s'égarer vocalement ni stylistiquement. Sa palette de nuances et de couleurs vocales est plus étendue.
Un moment de bonheur souvent jubilatoire, auquel le public a fait un accueil enthousiaste.
Alain Zürcher